Mayotte, Darmanin, fascisme : l’au-delà de l’indignation

L’indignation, le dégoût, la rage. Voilà, heureusement, ce que suscite l’opération de Macron et Darmanin à Mayotte. Mais quel en sera l’au-delà : soulèvement de masse solidaire ou terrain fertile pour le fascisme ? Une première réponse sera donnée avec la journée de manifestations du 29 avril ainsi que le 1er mai au Havre.

Billet de la Marche des Solidarités publié ici

Les tribunes et textes se multiplient pour condamner l’opération « Wuambushu » à Mayotte. A juste titre.

Car tout y est barbare : la violence des CRS et de la gendarmerie française, les appels au meurtre par un élu proche de la majorité présidentielle. Tout y est barbare : ces nouveaux degrés franchis par l’État français dans le racisme, le colonialisme, la destruction, à coups de grenades, d’armes ou de bulldozers de toute idée de liberté et d’égalité. Et l’image du futur que « construit » la politique du pouvoir. (cf notamment l’article de Edwy Plenel)

Bien sûr. Comment ne pas applaudir ces soulèvements du cœur et de la raison ?

Mais quel sera l’au-delà de l’indignation ?

Depuis maintenant des années les crans de l’horreur ont été ponctués de tribunes et d’indignations. Mais ils ont été franchis, de plus en plus vite, de plus en plus hauts. Et avec eux les niveaux de « tolérance ». La mémoire du petit Aylan dont le corps avait échoué sur une plage a été recouverte par tant d’autres corps anonymes au-dessus desquels les cœurs se sont fermés.

A tel point que Macron et Darmanin peuvent envisager que les discours assimilant étranger.es et délinquance pourraient permettre de clore la séquence de la colère sociale. A tel point que Macron et Darmanin peuvent penser que l’opération à Mayotte pourrait être la vitrine pour relancer leur loi raciste contre les immigré·e·s !

Sachez-le au cas où vous pourriez en douter. A la Marche des Solidarités et avec les collectifs de Sans-Papiers nous ne lâcherons rien. Mais, comme tout le monde, le dégoût et la colère ne nous empêchent pas, parfois, d’être fatigué·e·s. Fatigué.es que l’indignation ne vienne qu’après coup. Avec les images d’un nouveau cran franchi dans l’horreur. Cela fait des semaines que nous appelons à réagir contre l’opération programmée à Mayotte. Le 17 mars nous étions quelques centaines rassemblé·e·s devant le ministère des outre-mers. Nos appels à la journée du 25 mars puis au 29 avril témoignent du lien entre cette opération et la loi Darmanin.

Alors laissez-nous espérer que toutes ces tribunes et indignations ne resteront pas que des mots, utiles certes mais enfouis par les bulldozers, soufflés et asphyxiés dans l’air vicié par les grenades. Qu’elles deviendront mots d’ordre de soulèvement. Pas seulement des cœurs. Mais aussi des corps.

Car il existe un autre au-delà de l’indignation quand elle reste stérile. La terre que retournent les bulldozers à Mayotte et ailleurs, l’air que polluent les grenades, les mers transformées en cimetières, nos quartiers endeuillés par les crimes policiers comme les discours nationalistes et racistes peuvent être fertiles d’autre chose que de ripostes solidaires.

Le racisme et l’atomisation que cultivent Macron et Darmanin et qu’ils voudraient au service de plus d’exploitation et de consentement à l’État national et autoritaire est le terrain sur lequel prospère le fascisme, qu’il se donne la figure soit-disant respectable du RN ou celle de tous les groupes qui organisent la violence directe contre les immigré.es, les musulman.es et, de plus en plus, contre les militant.es et organisations antiracistes, féministes, syndicales. C’est-à-dire non pas seulement le consentement passif au racisme et au nationalisme mais la mobilisation active, sur ces thèmes, d’une fraction de la population.

Alors laissez-nous espérer - et nous y contribuerons activement - que nous serons nombreux et nombreuses le 29 avril à Paris, Marseille, Rennes, Grenoble, Toulouse, Lille, Strasbourg, St Brévin… contre Darmanin et son monde, contre sa loi, pour l’abandon de l’opération à Mayotte.

Jetons l’ordre de Macron et Darmanin à bas et nous aurons la Liberté ! © Campagne Antiracisme et Solidarité

Laissez-nous espérer que les syndicats, le 1er mai, rappelleront que ce n’est jour ni de fête nationale ni de fête du travail mais jour de solidarité internationale des travailleurs et des travailleuses et que cela signifie que notre classe ne pourra vaincre, construire un futur désirable que si elle démontre activement son refus de toute inégalité, de toute discrimination sur les terrains de l’origine, de la nationalité ou de la religion. Et que cela passe par un combat déterminé contre la loi Darmanin et pour la régularisation de tou·te·s les Sans-papiers.

Laissez-nous espérer - et nous y contribuerons - que de St Brévin le 29 avril au Havre le 1er mai, nous serons nombreuses et nombreux à dire que nous ne laisserons pas la gangrène fasciste pousser sur le terreau immonde de la politique de Darmanin.

Laissez-nous espérer que viennent 100 jours de colère pour barrer la route au monde de Macron et Darmanin, pour barrer la route au fascisme.

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