Haiku sans haiku

Invitation traduite depuis Brughiere.

Juan Sorroche, la personne qui a inspiré cet appel, est un compagnon anarchiste qui participe depuis plus de vingt ans à la lutte contre l’État et le capitalisme, subissant pour cela l’incarcération. En 2016, il devient fugitif pour échapper à différentes peines de prison (environ 6 ans) liées surtout à la lutte contre le TAV dans la Valsusa. Arrêté en mai 2019, il est condamné deux ans et demi en plus pour la possession de faux documents. À son arrestation, Juan découvre qu’il est accusé d’une attaque contre un local de la Lega (ndlt : Parti d’extrême droite italien) ayant eu lieu l’année précédente à Trévise, à une époque où le racisme d’État frappe avec acharnement, fermant les ports aux embarcations de migrant⋅e⋅s dans cette Méditerranée devenue véritable tombe à ciel ouvert, accomplissant ratissages, rafles, détentions administratives et expulsions. En première instance, il est condamné à 28 ans de prison ferme, peine abaissée à 14 ans et 10 mois en deuxième instance et actuellement en attente de décision de la Cassation. Il est enfermé dans la prison de Terni en régime de Haute Sécurité AS2. Notre ami et camarade réussit, malgré le lieu dans lequel il est retenu, à développer une créativité qui s’exprime grâce au collage et aux Haiku. Parfois il se plonge dans la méditation, les études, l’écriture de nombreuses lettres et court durant l’heure de promenade pour se tenir en forme. Inutile de dire que nous avons avec lui un lien particulier bâti sur l’amour et l’estime d’une personne qui, voyant la souffrance autour de lui, ne se détourne pas, mais agit pour tenter de changer les choses en prenant des risques.

Dans un monde qui a toujours plus besoin de cages et de barrières pour y enfermer toute forme de vie, nous aimerions cesser de diviser nos parcours de lutte de libération : intégrer la transformation intime, existentielle et individuelle à celle pour la destruction de chaque forme d’exploitation, d’oppression ou de privilège.
De fait, ce sont les deux faces de la même médaille : nous voulons observer les limites dans nos relations, les peurs qui proviennent de l’ego, l’incapacité d’orienter notre rage pour détruire en nous-mêmes et en-dehors les chaînes imposées par les cultures dominantes du présent et du passé.
Nous ne voulons reproduire ni les vieux rôles autoritaires ni les vieilles dichotomies maître-esclave ; nous aspirons au démantèlement de toute les structures coercitives, matérielles et culturelles : le capitalisme, le racisme, le sexisme, le binarisme de genre, le patriarcat et l’anthropocentrisme.

Les mots peuvent devenir des ponts pour les esprits et les cœurs, des clés pour avoir accès jusqu’aux cellules des prisons et en franchir les barreaux. Les idées sont impossibles à bloquer et difficiles à enfermer !
Nous aimerions créer un dialogue en vers impliquant toute personne allergique aux diverses formes d’autorité, à l’intérieur comme à l’extérieur des murs des structures carcérales.

Nous vous invitons à participer à cette récolte de mots, finalement libérés , syllabes incendiaires, haiku sans haiku et vers déchaînés !

Libérés des logiques de la métrique et à brides lâchées vers l’infini, libérés de la propriété et de la marchandisation. Les écrits recueillis, publiés en autoproduction sur papier, seront lus au cours d’initiatives autogérées et diffusés non seulement parmi toutes les personnes intéressées et "libres", bien que enfermées entre quatre murs, dans les prisons, dans les établissements psychiatriques et les centres de détention pour migrant⋅e⋅s, mais aussi à tou⋅te⋅s ceu⋅lle⋅x qui sont détenu⋅e⋅s dans les écoles, les usines, les quartiers et les campagnes, mais qui continuent à se sentir libres et ne se font plus d’illusions quand à l’avenir de cette société écocide.

Ceci est un appel pour ne pas arrêter de rêver, d’imaginer et réaliser d’inifinis mondes nouveaux !

Envoie ton œuvre à : EX LATTERIA Stradone S.Agostino 39r, 16123 Genova
ou à l’e-mail : versiscatenati[at]canaglie.net

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